Lavaredo by UTMB 80km +4’600m – DNF

3 jours de repos après le très étrange Xtra Trail Lavaux 50km +2’100m terminé en 6ème position, un petit footing et on place un bloc de 2 jours pour réaliser 70km +3’000m, histoire de travailler sur fatigue et ainsi simuler les conditions de fin de course qui se dérouleront au prestigieux Lavaredo.

Ce Lavaredo est clairement mon objectif principal de l’année, et une très très grosse envie et frustration qui guident ma motivation à me dépasser sur cette course. Plusieurs mois de blessure à batailler avec ma tête, avec des douleurs quasi-permanentes à l’entraînement, à me forcer à m’entraîner sur home trainer pour travailler la moindre les hautes intensités, à adapter de manière quotidienne mon entraînement en fonction des douleurs, à auto-masser, étirer, renforcer, se remobiliser, se remotiver en permanence, c’est chaud ! Honnêtement je ne sais pas par quelle miracle je n’ai pas abandonné cette préparation. C’est sûr il y a eu plus de bas que de haut durant ces mois. Et quand j’ai ressenti par deux fois de légères gênes dans les ischios à la fin de 2 grandes séances trail avec des intensités, j’ai en toute connaissance de cause pris le paris de forcer la fin de ma préparation pour arriver en forme sur le Lavaredo, cette course mythique, une des plus belles et relevé au monde. Je me le devais et j’aurais eu encore plus de regret à ne pas me présenter à cette course, que de tenter le coup et d’abandonner (spoiler alert) comme cela a été le cas.

Départ donc pour les Dolomites italiennes (Cortina d’Ampezzo) avec un passage par l’Autriche. Les derniers jours avant la course se passent plutôt bien. L’affûtage fait son habituel effet étrange et déclenche pas mal de douleurs parasites et autres nervosités et fringales. Samedi 24 juin 6h50 je suis bien sur la ligne de départ de ce 80km à San Vito Di Cadore, mon plus grand défi physique jusqu’à ce jour. Grosse émotion, sur le front de ce peloton d’un millier de personne, je me sens seul au monde, perdu dans mes pensées, avec en-tête les 6 derniers mois de galère. Entre peur, révolte, excitation et frustration, j’en ai “gros sur la patate” et envie d’en découdre. Pourtant une petite larme m’échappe…

ça part rapidement, je suis conscient d’avoir la 76ème côte au départ (avec un UTMB index de 689), mais je sais que cet index de performance est dien en deça de ce que je peux faire. 4 premiers km à 3’40/km à plat et légère gêne à l’ischio à gauche. Rien d’alarmant, je prends note et calme le jeu après 20mn de course pour entrer dans des fréquences cardiaques plus abordables à long terme.

La première montée, c’est +1’100m à encaisser en 8km avec des passages montagneux assuré avec des chaînes dans la roche. Niveau cardio, tout est ok je passe le 1er point de passage dans le top-40 et peut directement relancer à la bascule, donc tout se passe bien. Conscient de mes faiblesse en descente, surtout vu la technicité de cette première descente, j’y vais plutôt tranquille, en sachant pertinemment que je pourrai relancer ensuite.


La gêne à l’ischio devient de plus en plus présente, mais cela ne m’inquiète toujours pas. Mauvaise surprise au 1er ravitaillement, alors que les organisateurs avaient indiqué un ravitaillement solide, nous ne trouvons que de l’eau. Belle erreur de ma part d’être parti “light” au niveau nourriture et boisson. Je me retrouve donc complètement à sec pendant 45mn. Pas bon pour l’organisme…

Fin de la 1ère descente, on attaque une partie très roulante et je n’ai pas les jambes pour relancer, je dois me forcer à marcher malgré la facilité du terrain, il apparaît clair que le manque de renforcement musculaire a un impact à ce moment. Je paie également le problème de ravitaillement et ressens cette douleur à l’ischio de plus en plus présente. Reprise d’une montée en compagnie d’un Suédois à qui je fait part de mes soucis.

J’entame la seconde montée et la douleur à l’ischio devient permanente. Gros down moral (petite hypo donc ?) durant cette dernière heure de course et je sais qu’il me faudra encore faire 45mn d’effort avant d’arriver au 2ème ravitaillement (le 1er avec assistance) et retrouver Delphine.

J’arrive sur ce ravitaillement démoralisé et ne pouvant quasiment plus courir. Je m’impose un break de 10mn, je m’alimente et bois pour reprendre du poil, et Delphine me masse l’ischios qui est BETON. On se parle, je veux arrêter avant que cela ne devienne trop grave. C’est trop facile d’abandonner sur un trail long, il y a trop d’opportunité et trop de raison de le faire. Delphine m’indique qu’il y a 9km jusqu’au prochain ravitaillement assisté avec une grande partie en descente, donc potentiellement peu de travail des ischios.

Je repars à l’assaut de ce prochain ravitaillement. Step by step comme on dit.

La pause et le massage ne font pas illusion très longtemps, après 10mn de montée les douleurs reviennent. Je finis cette seconde ascension et entame la descente sur un bon rythme, persuadé que ça va passer. Pourtant les douleurs empirent. Je me retrouve même à marcher à la descente, c’est la misère. Un sympathique roumain me voyant assis au milieu du chemin me tend un sachet rempli de pillules… “pain killer” qu’il me dit ! Sans commentaire !

Arrivé au 3ème ravitaillement à la moitié de la course, je me rend à l’évidence. Certes il y’aurait une possibilité de finir la course en marchant, mais avec quelles conséquences ? Risquer une déchirure musculaire ou une tendinopathie et repartir pour 4 mois de blessure ?

Bref, le coeur gros j’enlève mon dossard et le tend au responsable de la Aid Station…

Certainement pas la fin que j’aurais imaginé. Si, à première vue j’ai pensé avoir rapidement digéré cette course, je sais que mentalement, elle a eu un impact important sur moi. Cette année 2023 est clairement une année de transition et d’adaptation pour mon corps à la course à pied et surtout aux longues distances.

S’il fallait garder le positif de cette période, c’est ma certitude que c’est une adaptation/étape nécessaire à ma progression et que ceci n’est que le début de mes aventures. J’ai déjà une très très grosse envie de m’exploser et d’en découdre avec moi-même sur de plus longues distances, et une confiance totale en mon sale caractère pour retrouver les ressources et être de retour plus solide, expérimenté et cinglé qu’avant. C’est également le prix à payer pour comprendre qu’un trail long ne s’aborde pas de la même manière qu’un 30km, et que je dois être plus attentif à ma gestion de course, notamment dans les intensités afin de limiter l’impact musculaire tout au long de la course.

Heureusement la semaine de vacances qui suivra, dans les Dolomites et en Autriche fut d’une grande aide.

1 semaine de repos complet, puis faire le point…